JE TE L'AVAIS DIT | LE JOURNAL
Aujourd'hui, c'est Aurélie, la co-fondatrice du super podcast québéco-français Curiozidée qui nous dévoile un brin de son histoire en tant que parent qui chemine dans la bienveillance et, surtout, dans le respect de l'enfant. Une anecdote anodine mais qui invite fortement à la réflexion. Merci, chère Aurélie!
Et surtout, vous êtes tous et toutes les bienvenus à me soumettre vos réflexions, histoires et moments touchants de parents. N'hésitez pas à me soumettre vos créations via mon courriel : elisabeth.simard@gmail.com en indiquant "Ruban Cassette" comme objet. Bonne lecture!
Il y a un an, je réalisais que, pour la première fois, je n’avais pas dit : « Je te l’avais dit » à mon fils de 4 ans qui venait de tomber sur le chemin de la garderie alors que je l’avais prévenu à maintes reprises.
Je me rappelle de ce moment comme si c’était hier.
Sur le coup, je ne réalise rien. Je relève mon fils, je l’embrasse, lui offre des bras pour calmer sa peine puis on continue le chemin. Je les accompagne, lui et sa sœur, à la garderie et m’en vais attendre le bus pour rentrer chez nous. Et c’est là devant l’arrêt d’autobus, en train de me geler les doigts, que tout a défilé devant mes yeux : mon fils qui s’amuse sur des branches, moi qui le prévient, lui qui tombe et… juste un câlin.
Ce jour-là restera à jamais ancré dans ma mémoire. C’est le jour où les concepts de parentalité positive et de bienveillance qui m’interpellaient n’étaient plus des concepts mais une partie de moi.
C’est le jour où j’ai décidé qu’à partir de maintenant j’allais établir une relation bienveillante avec mes enfants et non pas être déchirée entre le lien éducatif que je souhaitais établir avec eux et l’attitude que je serais supposée avoir selon mon éducation, mon passé, mon environnement.
Je me suis sentie si bien à seulement être là pour mon fils, à ses côtés. Qu’il sache qu’il n’est pas seul et qu’il peut compter sur moi pour l’aider à se relever et non pas pour le juger.
Je ne dis pas que depuis ce jour je n’ai plus jamais dit « Maman vous l’avait dit ». Je ne suis pas parfaite, je suis parfois fatiguée (vous savez les jours où l’on s’est levé 8 fois la nuit passée, tsé le super combo : cauchemar/soif/perte du doudou et pipi au lit) .
Et on a tous notre héritage d’éducation. Ah! le fameux héritage éducatif…. Encore un truc que l’on ne réalise pas trop avant d’avoir des enfants. Du « je ne ferais jamais comme mes parents » au « quand j’étais petite mes parents faisaient cela et je n’ai pas mal tourné », on est tous fortement influencé par NOTRE histoire.
Toutefois, ma relation avec mes enfants a changé. J’ai toujours pensé que c’était à eux de vivre leurs expériences de vie, mais je n’avais pas réalisé que cela signifiait aussi que c’était à eux d’en apprendre les leçons.
Ils n’ont pas besoin de moi pour leur rappeler que l’adulte en moi les avait prévenu, que MOI je le savais, NON. Ils ont besoin de se faire confiance, d’avoir assez d’estime d’eux pour se dire « OK, je vais essayer autrement la prochaine fois. Allez je me relève, je ne suis pas seul, je vais essayer autrement, peut-être que je vais retomber mais je continue. »
Bien entendu aucun parent ne dit « Je te l’avais bien dit » dans l’idée de montrer sa supériorité, mais plutôt, il me semble, dans une sorte d’élan d’amour. Dans mon cas c’était ma façon de dire : « Écoute maman. Je t’aime et je suis là pour te protéger. En voici la preuve, je t’avais prévenu que tu allais te blesser. »
Mais est-ce réellement de cette façon que nos enfants perçoivent notre intervention ?
Personnellement me sentirais-je entourée d’amour et de soutien en tant qu’adulte si on me disait :
« Je t’avais dit que cette méthode ne mènerait nulle part. »
« Je te l’avais dit que ce n’était pas un gars pour toi. »
« Je vous l’avais dit qu’ils n’apprécieraient pas votre présentation »
Pas sûre. Aurais-je confiance en ma prise de décision, en mon bon jugement, tout simplement, aurais-je confiance en moi ?
Alors si, en tant qu’adulte, je pense que ces phrases n’auraient pas un bon impact sur moi, pourquoi les dire à mes enfants ?
Je crois profondément que nos enfants méritent le même respect, le même égard qu’un adulte. Leur taille est plus petite que la nôtre effectivement, leur langage et leur motricité parfois moins fines mais leurs émotions sont les mêmes que celles des « adultes ».
Ils ont le droit d’être en colère, d’être ultra-joyeux, d’être mous, d’être distants et ils ont le droit de se tromper, de tomber et aussi de comprendre pourquoi ils sont tombés et d’y trouver une solution (qui peut-être de retomber encore… eh oui, doser son envie versus le risque, ça aussi ça s’apprend!).
Et nous, les parents, dans tout cela ? J’aime à penser que notre rôle est encore plus merveilleux que ce que je croyais il y a un an.
Et si notre rôle n’était que de les entourer d’empathie, de soutien et de milliers de câlins, afin qu’ils se sentent soutenus, compris, écoutés mais surtout libres?